Point de vue

Les expérimentations 5G d’orange, un levier de maîtrise du déploiement industriel

jeu. 06 févr. 2020

La croissance continue de la consommation de données sur le mobile, le besoin de couverture et le potentiel des futurs usages 5G, confortent le bien-fondé d’investissements non seulement dans le nouveau réseau mais dans le très haut débit sous toutes ses facettes : 4G/5G/fibre.

Depuis l’automne 2019, Orange France réalise des expérimentations 5G grandeur nature dans plusieurs villes pilotes. Ces tests impliquent les équipes qui seront mobilisées sur le déploiement de la nouvelle technologie. Ils associent les équipementiers, les clients d’Orange, le gouvernement et les collectivités locales. Quels sont leurs objectifs et leurs enseignements ? Réponses de Marc Blanchet.

Quelles questions se pose un opérateur comme Orange à la veille du déploiement de son réseau 5G en France ?

L’opérateur se pose bien entendu des questions industrielles car la 5G est une technologie plus en rupture que les générations mobiles précédentes. Au-delà, il s’interroge sur des choix stratégiques et financiers :

  • Doit-il déployer la 5G un peu partout pour donner un signal de couverture rapide à une large population ? Doit-il plutôt concentrer la promesse de la 5G sur quelques zones où elle offrira une expérience réellement différente de celle de la 4G ?
  • Combien de blocs de fréquences convient-il d’acquérir pour adresser la bonne capacité dans 10 ans, sachant que, dans certains pays, le coût des fréquences est très onéreux ?

Etant donné que les futurs usages de la 5G n’existent pas, ces choix reposent sur de simples hypothèses : services développés à terme, rapidité de développement, quantité de données consommées par ces usages, capacité de valorisation des nouveaux services sur les marchés B2C et B2B…

Nous projeter dans la 5G ne doit cependant pas nous faire oublier l’attente n°1 de nos clients : une couverture en très haut débit mobile de qualité partout sur le territoire. La 5G ne sera pas l’unique réponse à cette attente. Certes, elle permettra de décongestionner le réseau 4G en zone urbaine et d’accompagner la croissance des données. Mais parallèlement à son déploiement, nous devrons poursuivre la densification de notre réseau 4G notamment en zone rurale.

Quelles seront les étapes du déploiement du réseau 5G Orange en France ?

Comme d’autres pays, Orange France a choisi de lancer la 5G en mode NSA dans la bande des 3,5 GHz suivant un cheminement retenu par nombre d’opérateurs. En 2020, nous déploieront des systèmes antennaires 5G sur un cœur de réseau 4G, au terme d’une phase conséquente de tests grandeur nature lancés en 2019. La 5G SA arrivera deux ou trois ans plus tard avec toutes ses promesses de latence et de slicing ciblées sur le marché du B2B.

Quels sont les objectifs des expérimentations qu’Orange a lancées dans plusieurs villes pilotes depuis l’automne 2019 ?

Nous ne cherchons pas à savoir si la technologie 5G fonctionne. Ce volet est vérifié en laboratoire. La campagne de tests que nous menons à grande échelle dans 6 villes pilotes poursuit deux objectifs :

  • Le premier c’est la préparation du déploiement industriel de la 5G sur des milliers de sites. La démarche permet aux équipes de nos 5 Unités régionales de Pilotage Réseaux de se projeter de façon opérationnelle dans le futur déploiement : elles évaluent son impact sur nos processus, nos modes de fonctionnement et la réalité physique de chacun de nos sites. Les tests portent sur des sujets très concrets : le maillage du territoire, la continuité de service dans différents types de configuration, l’intégration des équipements sur les toits terrasse, le type de paramétrage à choisir, l’étude de l’alimentation et de la consommation énergétiques.
  • Le second enjeu est de commencer à sensibiliser à cette nouvelle technologie les collaborateurs d’Orange, le grand public et les entreprises, en mettant en scène ses premiers usages innovants. Nos expérimentations permettent à ces futurs usagers de vivre des expériences qu’ils n’imaginaient pas. En même temps, elles positionnent Orange comme un opérateur leader sur la 5G.

Quels types de tests réalisez-vous et quels ont été vos critères de choix des villes et sites pilotes Orange ?

Nous réalisons deux types d’expérimentations principalement dans la bande des 3,5 GHz, même si quelques sites sont couverts en 26 GHz :

  • Des tests à échelle réduite sur des sites spécifiques : Orange Gardens à Châtillon, le circuit automobile de Linas-Montlhéry, la gare de Rennes…
  • Des expérimentations grandeur réelle dans les zones périurbaines de 6 villes pilotes couvrant les 5 zones d’intervention régionale d’Orange (IDF, Grand Nord-Est, Ouest, Sud-Ouest et Sud) : Paris quartier de l’Opéra, Lille, Douai, Nantes, Marseille et Montpellier. Nous avons maillé chacune de ces villes de 50 à 80 sites radio 5G.

Quels autres acteurs associez-vous à ces expérimentations ?

Nous travaillons avec nos partenaires historiques : les équipementiers Nokia et Ericsson, ainsi que Samsung et ZTE au niveau du Groupe. Nous associons les clients d’Orange, les collectivités locales concernées ainsi que le gouvernement et les agences gouvernementales – l’ARCEP et l’Agence nationale des fréquences (ANFR) - curieuses de découvrir la nouvelle technologie.

Quel retour d’expérience faites-vous d’un trimestre de tests ?

Ces expérimentations nous ont clairement indiqué que le déploiement de la 5G ne s’inscrivait pas dans la continuité de celui de la 4G. Il nécessite une refonte de nos processus, donc une évolution des compétences de nos équipes basée sur de la formation.

Elles nous ont conduits à beaucoup travailler sur certains sujets techniques qui sont des leviers importants de réduction des coûts du déploiement : le dimensionnement et la puissance des antennes à installer ainsi que l’optimisation de la consommation d’énergie des sites.

Le déploiement du réseau 5G nécessite-t-il des investissements plus lourds que le réseau 4G ? Le retour sur investissement sera-t-il plus long ?

Le coût du déploiement de la 5G sera probablement[CF1] plus élevé que celui de la 4G. Mais l’aventure ne fait que commencer. Elle sera longue. Les investissements comme la valeur seront donc lissés dans la durée. Certes, les business model ne sont pas évidents. Les services restent à inventer. Il faudra travailler les modalités de monétisation des spécificités de la 5G qui seront les clés du ROI. Mais si nous parvenons aujourd’hui à valoriser un accès internet sur la fibre plus cher qu’un accès ADSL, il n’y aucune raison que dans un marché aussi développé et concurrentiel que la France, nous n’arrivions pas à valoriser les innovations de la 5G.

La croissance continue de la consommation de données sur le mobile, le besoin de couverture et le potentiel des futurs usages 5G, confortent le bien-fondé d’investissements non seulement dans le nouveau réseau mais dans le très haut débit sous toutes ses facettes : 4G/5G/fibre. En effet, le critère essentiel qui doit guider les choix d’investissements de l’opérateur, c’est : servir le besoin de connectivité du client partout. Dans cette approche, la 5G ne constitue qu’un des éléments d’une promesse plus globale.

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Marc Blanchet

Directeur Technique et du Système Information