Point de vue

Bonnes pratiques pour lancer un bot efficace

mar. 12 nov. 2019

Les bots offrent aux opérateurs l’opportunité de renforcer leur proximité client par une relation personnalisée et omnicanale. Complémentaire aux conseillers clients, le bot n’a pas vocation à  les remplacer même s’il va profondément transformer la nature de leurs missions.

Florent Broutin

L’effet Waouh passé, les bots ont plongé dans le « gouffre des désillusions » de la courbe de Gartner (Hype Cycle) [1]. Leur intelligence est perfectible. Ils ne remplacent pas les conseillers du service clients. Ils ne délivrent pas un service acceptable sans mobiliser un temps humain considérable. Les bots promettent néanmoins de révolutionner l’expérience client, ce qui les place au cœur de toute stratégie de transformation digitale. Alors, pourquoi est-ce un outil incontournable ? Comment vous lancer en évitant les pièges et optimiser votre relation client ?

Un outil incontournable de la relation client digitale

Logiciels programmés pour simuler une conversation en langage naturel, les bots se répandent sur les sites web des marques, les réseaux sociaux et les messageries. Ils répondent à des requêtes de clients par écrit ou par oral, les assistent ou les conseillent.

Leurs bénéfices ne peuvent que convaincre l’opérateur de se lancer.

Une expérience client plus fluide

D’un côté, ils améliorent l’expérience client : c’est une interface simple à utiliser et ludique. Elle regroupe plusieurs services, fait gagner du temps aux clients (disponibilité 24/7, pas d’attente), leur apporte des réponses personnalisées et instantanées.

Gain de temps pour le service client

De l’autre, le bot améliore l’efficacité opérationnelle : l’entreprise peut déléguer au bot les réponses aux requêtes récurrentes et simples à traiter afin de focaliser ses interfaces humaines sur des sujets complexes (contestation d’une facture) ou à risque (perte d’un client…).

Des premières expériences très positives

L’analyse du marché actuel confirme une montée en puissance de l’attractivité des bots. 7 clients sur 10 préfèrent échanger avec un bot pour gagner du temps [2]. En 2020, 25% des interactions des services clients devraient passer par des chatbots [3].

Les retours d’expérience des opérateurs sont positifs :

  • En Espagne, Aura a permis à Telefonica de traiter 22% de demandes de clients prépayés en plus. 70% des achats de ces clients ont été prescrits via le bot.
  • Au Royaume-Uni, TOBi de Vodafone a enregistré un taux de conversion 100% supérieur à celui d’un site web classique et réduit de 50% la durée de la transaction [4].

6 challenges à relever pour créer un bot efficace

La simplicité de déploiement d’une plateforme bot, tant vantée par les fournisseurs de solutions, n’est pas toujours synonyme d’une meilleure qualité de service pour l’utilisateur. Le risque est grand de dégrader l’expérience du client qu’on prive de son interface web familière : il aura des exigences bien plus élevées vis-à-vis du robot avec qui l’échange sera comparé à celui avec un contact humain.

La conception, le déploiement et l’exploitation d’un bot doivent donc être bien pensés et bien organisés. Pour cela, il est essentiel de passer par ces 6 étapes.

1. Borner le sujet

Il faut d’abord définir les scénarios d’usages à couvrir (e-shop, TV, facture, dépannage internet, assistance, service client, gestionnaire RH interne…) et les fonctionnalités du bot. Avantages : donner de la visibilité au projet, assoir sa légitimité et fédérer autour de lui.

2. Anticiper les freins pour les lever

Ces freins peuvent être :

  • organisationnels : recrutement/formation des membres de l’équipe projet) ;
  • budgétaires : l’enveloppe devra couvrir la construction mais aussi l’exploitation continue de l’outil) ;
  • technologiques : le SI est-il assez structuré et mature ? ;
  • ou encore fonctionnels : les contenus des arbres de conversations préexistent-ils ?

3. Choisir sa solution

Trois options opérationnelles offrent des performances différentes :

  • Le searchbot (agrégateur de contenus existants). Facile d’accès et adressant de nombreux usages, il permet à l’opérateur de monter en expertise tout en améliorant l’expérience client.
  • Le chatbot (agent conversationnel). Apportant des réponses plus précises et personnalisées au client, il accroît la qualité de son expérience, mais requiert une organisation et une technologie matures.
  • Le métabot/assistant virtuel (orchestrateur de bots). Cette solution complexe, réservée aux grands opérateurs, est la plus aboutie.

4. Implémenter la solution via une approche itérative et incrémentale

Il faut se lancer progressivement pour minimiser le risque de déception des clients. Je conseille de définir et ne cibler que la partie essentielle du scénario à tester- le fameux « MVP » (Minimum Viable Product)- sur une population limitée. Optimiser ensuite ce périmètre par itérations successives avant de l’élargir progressivement.

5. Mobiliser une équipe d’exploitation

Cette équipe, idéalement organisée en mode agile, devra intégrer au moins 5 rôles :

1 chef de projet
Responsable du budget, de la priorisation, du reporting, etc.
1 référent technique 
Garant de la stabilité de la solution En charge des évolutions techniques
1 cognitive trainer
Définition des arbres de décisions en phase de construction, optimisation via analyse des conversations en phase d’exploitation
1 rédacteur UX Rédaction de l’ensemble des réponses au client
1 paramétreur Intégration des arbres et du champ lexical dans le back-office

Profil-type de l’équipe d’exploitation d’un bot

6. Organiser un apprentissage continu et dynamique du bot sur la durée

Le bot doit s’améliorer en permanence. Il doit être entraîné et intégrer de nouvelles fonctionnalités. En effet, 60 intentions vont couvrir 90% des requêtes clients, mais la complétion des 10% restant est atteinte suite à l’implémentation de 260 intentions additionnelles.
Sécuriser un budget pour l’amélioration continue est donc primordial.


Comment optimiser l’expérience client ?

Les avancées de la R&D sur l’Intelligence Artificielle, le traitement automatique du langage naturel, l’apprentissage supervisé et le deep learning rendront à terme les bots plus intelligents et autonomes (auto-apprenants). Elles libèreront du temps humain et feront émerger des cas d’usage innovants. En attendant cette révolution, les solutions disponibles offrent déjà à l’opérateur l’opportunité d’apporter des réponses aux défis stratégiques de sa relation clients.

En permettant de réaliser des parcours de bout en bout

Avec une solution ActionBot intégrant plusieurs services dans un même chatbot, l’opérateur offre à ses clients une expérience end-to-end : le chatbot comprend le besoin de l’utilisateur (ex. dépannage d’un box). Au lieu de le diriger vers l’application de diagnostic de la box, qui obligera le client à sortir du chatbot, il réalise lui-même la tâche et informe le client du résultat.A noter : une APIsation des services de l’opérateur est nécessaire pour permettre au chatbot d’agir directement sur les services.

En assurant une continuité entre le bot et les conseillers

Il est essentiel que le bot soit capable d’établir un lien entre les clients et les agents :

  • soit dans une stratégie de qualification des demandes client avant de transférer automatiquement vers un agent,
  • soit en permettant à un agent de reprendre le fil de la conversation quand le bot n’est pas capable de répondre à la requête du client.

Dans les deux cas, le transfert de contexte est clé pour éviter au client d’avoir à réexpliquer son problème et accélérer la résolution de la demande.

En décloisonnant les périmètres fonctionnels des bots grâce au métabot

Le metabot permet à un opérateur multiservices d’assurer une convergence de l’expérience client au sein d’une seule et même interface. Il est apte à répondre aux requêtes du client sur tous les sujets : son compte bancaire, ses services mobiles, sa TV…


En conclusion

Les bots offrent aux opérateurs l’opportunité de renforcer leur proximité client par une relation personnalisée et omnicanale. Complémentaire aux conseillers clients, le bot n’a pas vocation à  les remplacer même s’il va profondément transformer la nature de leurs missions. Décharger les conseillers de tâches à faible valeur ajoutée nécessitera un développement de leurs compétences dans l’assistance technique, le traitement de la data et l’écoute active des clients. La transformation digitale passera donc avant tout par une transformation humaine. Et c’est en sélectionnant la technologie adaptée à la maturité de chaque organisation et en définissant des ambitions corrélées avec leur propre courbe d’apprentissage que les opérateurs atteindront leurs objectifs d’amélioration de la satisfaction client. Alors qu’attendez-vous pour vous lancer ?



Sources :
[1] Bryan, J. (2018) 4 Trends in Gartner Hype Cycle for Customer Service and Customer Engagement.
[2] 2017 Chatbot Report (2017), Ubisend
[3] Moore, S. (2018) Gartner Says 25 Percent of Customer Service Operations Will Use Virtual Customer Assistants by 2020.
[4] Harrison, R. (2019) ‘AI & Digital Assistants: Telco Propositions & Revenues’. Mobile Market Development.